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à Marioupol, encerclée par les forces russes, la population « n’a nulle part où aller »


Marioupol, ville martyre de la guerre en Ukraine ? Assiégée depuis le début du mois de mars par les forces russes et les séparatistes prorusses, la cité portuaire sur la mer d’Azov se trouve désormais sous des bombardements constants. Et les bâtiments civils ne sont pas épargnés. Un théâtre où s’étaient réfugiés des centaines de familles a ainsi été touché par une frappe, mercredi 16 mars. Accusé, le Kremlin a nié toute responsabilité.

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Pour les habitants qui n’ont pas fui cette ville du Donbass encore aux mains de Kiev – ils seraient environ 300 000 selon les estimations – le quotidien prend des airs de cauchemar éveillé. Les frappes russes, qui se sont intensifiées au cours des derniers jours, ont détruit une grande partie de la cité de 450 000 habitants. Depuis plus de deux semaines, l’électricité et les communications sont coupées et quelques rares endroits captent encore un faible signal téléphonique.

La population, à bout, terrée dans des caves ou des abris de fortune, n’a plus d’eau ni de quoi manger. Plusieurs tentatives pour acheminer de l’aide humanitaire ont échoué. Certains habitants ont raconté à l’AFP avoir fait fondre de la neige pour boire et cuire le peu de nourriture encore disponible, alors qu’ils se trouvaient sur la route pour rejoindre Zaporijia, plus à l’ouest.

Des habitants réfugiés dans un abri improvisé font la queue pour obtenir un repas, à Marioupol (Ukraine) le 7 mars 2022. (EVGENIY MALOLETKA / AP)

« La ville est désormais encerclée par les soldats russes, qui en ôtent doucement la vie, explosion après explosion », écrit l’Associated Press (en anglais), dernier média international à disposer encore de journalistes sur place. D’après le gouvernement ukrainien, plus de 2 350 personnes sont mortes à Marioupol. Mais le chiffre pourrait être bien plus élevé. Les reporters d’AP font ainsi état de fosses communes et décrivent des rues jonchées de corps abandonnés depuis au moins une semaine, tués par des bombardements incessants, « un toutes les minutes parfois ».

Des hommes déplacent un corps dans une fosse commune, à Marioupol (Ukraine), le 9 mars 2022. (EVGENIY MALOLETKA / AP)

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), dont une équipe est encore présente dans la ville, décrit aussi une situation catastrophique pour les populations civiles. « Les gens commencent à s’attaquer pour avoir de la nourriture. Ils détruisent les voitures de leurs concitoyens pour en prendre l’essence » pour se chauffer ou faire cuire des aliments, décrit l’équipe dans un échange audio daté du 10 mars. « La population devient malade à cause du froid. Ils n’ont nulle part où aller » et beaucoup n’ont plus à manger pour leurs enfants.

Un policier marche à côté de corps de personnes tuées dans des bombardements, à côté d'un hôpital de Marioupol (Ukraine), le 15 mars 2022. (EVGENIY MALOLETKA / AP)

Les membres du CICR expliquent « essayer de faire du mieux » qu’elle peut face à des civils qui « ont peur ». « On essaie de donner de l’électricité grâce au générateur aux gens dans la rue pour qu’ils puissent recharger leurs téléphones. Ils les utilisent comme des lumières quand la nuit tombe. » Fort de ces témoignages dramatiques, le CICR a mis en garde (en anglais) dimanche contre « un scénario du pire » à Marioupol. « L’histoire jugera avec horreur ce qui est en train de se passer dans cette ville si aucun accord n’est trouvé le plus vite possible entre les parties », insiste l’organisation.

A en croire le récit de l’Associated Press, les bombardements semblent avoir redoublé d’intensité depuis une dizaine de jours et touchent de nombreux bâtiments civils. Le bombardement d’une maternité, le 9 mars, a ainsi suscité l’émoi de la communauté internationale.

L’image de Mariana Vishegirskaya, qui a donné naissance à une petite fille après avoir été sortie des décombres en pyjama, a fait le tour du monde. Mais toutes les femmes n’ont pas eu cette chance. Dans son reportage, AP rapporte ainsi l’histoire déchirante de cette autre femme enceinte, sortie des décombres par les secours, morte quelques minutes après avoir été obligée d’accoucher de son enfant mort-né à cause du bombardement. « Les médecins n’ont pas eu le temps de leur demander leurs noms », écrit l’agence de presse américaine.

Anastasia Erashova, un enfant dans les bras, pleure la mort de son autre enfant après un bombardement, le 11 mars 2022 à Marioupol (Ukraine). (EVGENIY MALOLETKA / AP)

Mercredi, c’est le théâtre régional de Donetsk qui a été la cible d’une frappe. Selon les autorités locales et l’association Human Rights Watch, plusieurs centaines de personnes y avaient trouvé refuge, les premières évoquant « un millier de personnes », l’ONG assurant que 500 à 800 personnes s’y trouvaient. Une photo de l’édifice montre le mot « enfants » écrit sur le trottoir, en immenses lettres blanches et en russe, à l’avant et à l’arrière du bâtiment, pour alerter sur la présence de civils à l’intérieur. Pour l’heure, le nombre exact de victimes reste à déterminer.

Les premiers témoignages de blessés ont commencé à affluer, jeudi. L’une d’elles, Olga, a pu être contactée par franceinfo. « Je peux juste vous dire que la frappe était un peu moins puissante de notre côté du bâtiment, a-t-elle expliqué, visiblement perdue. Mais le plafond s’est effondré. Je suis blessée à la tête, mais je suis vivante ! » Elle n’a pour l’instant pas de nouvelles de son mari « resté sous les décombres ».

Les autorités ukrainiennes affirment que celles et ceux qui tentent de fuir sont fréquemment pris pour cible par des tirs. « A un moment, il y avait des gens qui tentaient de fuir à pied. Un obus est tombé à 50 mètres d’eux », racontait ainsi à l’AFP Ioulia, une habitante qui a réussi à s’enfuir le 11 mars. « Sur la route, nous avons vu des voitures civiles brûlées, parfois renversées sur le côté. Nous avons compris que les Russes leur avaient tiré dessus. »

Des chars russes dans les rues de la périphérie de Marioupol (Ukraine) le 11 mars 2022. (EVGENIY MALOLETKA / AP)

Les évacuations de civils se sont accélérées mi-mars. Mardi, plusieurs milliers de personnes ont été acheminées vers Zaporijia, à 270 km de Marioupol, toujours selon les autorités ukrainiennes. Jusque-là épargnée par le conflit, la ville a toutefois à son tour aussi été touchée par plusieurs frappes, qui ont endommagé la gare.





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