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Expatriation au Canada : cinq pièges à éviter


Même si le Canada est un pays ouvert à l’immigration, s’y installer ne s’improvise pas… Pour éviter les désillusions et réussir au mieux son intégration, quelques précautions s’imposent. Revue de détails des chausse-trappes les plus courantes.


Cet article est extrait du Figaro spécial «D’Est en Ouest – Vivre au Canada pourquoi pas vous ?». Ce numéro vous propose de répondre le plus simplement possible aux questions que vous vous posez. Cela, à grand renfort de textes pratiques, de cartes et de témoignages de Français installés au Canada.


1/ Négliger la préparation

Savez-vous que le Canada offre de nombreuses possibilités de visas qui, selon votre profil (âge, secteur d’activité, appétence pour une province en particulier), pourraient s’avérer d’intéressantes portes d’entrée ? Pour vous aider à y voir clair (et à affiner votre stratégie), l’Ambassade du Canada en France propose régulièrement des sessions d’information gratuites sur les procédures d’immigration. Ne ratez pas non plus le salon annuel Destination Canada, qui met en avant les possibilités de vie et de travail dans les provinces et territoires autres que le Québec.

Si c’est la Belle Province qui vous attire, vous trouverez de nombreuses ressources sur la page Facebook « Choisir le Québec ». Plusieurs événements de recrutement sont également organisés dans l’année, notamment les « Journées Québec ».

Prenez également le temps de vous renseigner sur le pays lui-même, qui n’est pas uniforme. « Le Canada fait 6000 kilomètres ‘coast to coast’ et chaque province et territoire a son identité et son histoire, souligne Cécile Lazartigues-Chartier, consultante à l’Art et la manière – conseil en interculturel. Il est primordial de se faire une culture générale. Le Québec, par exemple, est très soucieux de sa spécificité au sein de la fédération canadienne. Si, à Montréal, vous dites : ‘Je suis tellement content d’être au Canada’, vous avez déjà perdu cinq points ! »

Dans la mesure du possible, prévoyez un voyage exploratoire dans la (ou les) ville(s) qui vous intéresse(nt). N’hésitez pas à solliciter des employeurs potentiels, des directeurs d’écoles ou encore des Français déjà installés pour avoir une vision plus précise de votre futur environnement.

Attention aussi, si vous partez en couple, à bien définir les aspirations de l’un et de l’autre. « Je dis souvent : ‘projet commun, mais projet chacun’, résume Marilène Garceau, directrice-associée du cabinet de conseil en mobilité internationale Kennedy Garceau. Ce qu’on observe c’est que, lorsque l’expatriation est liée à une opportunité professionnelle de l’un des membres du couple, le conjoint – qui est souvent la conjointe – se concentre d’abord sur l’installation de la famille. Mais, une fois que c’est fait, celle-ci se retrouve démunie lorsqu’il s’agit de construire son propre projet. Mon conseil ? Commencer à réfléchir à son objectif plusieurs mois avant de partir et même prendre des contacts afin de pouvoir se mettre en mouvement plus facilement quand on sera prêt. »

2/ Idéaliser son pays d’accueil

Disons-le tout net : non, le Canada n’est pas un eldorado et s’y installer n’est ni un gage de réussite absolue, ni la promesse d’un quotidien constamment serein ! Bien sûr, le pays a des atouts et il est possible de s’y façonner une vie épanouissante, mais cela ne veut pas dire que tout s’avèrera idéal. Les conditions climatiques peuvent être particulièrement rudes, le système de santé n’est pas organisé de la même manière qu’en France, les congés légaux se limitent à deux semaines par an quand on démarre dans une entreprise… Sans parler de l’éloignement familial, qui peut peser sur le moral. S’expatrier, c’est aussi faire preuve de flexibilité. La clé ? Ne pas partir pour fuir, mais bien pour construire, avec tous les défis que cela implique.

Prenez garde aussi aux idées reçues, comme celle de croire que « tout le monde est bilingue au Canada », prévient Marilène Garceau. Même si le pays dispose de deux langues officielles, l’usage est très variable d’une province à l’autre – et même d’une ville à l’autre. Ainsi, à Montréal, il n’est pas rare, dans les entreprises à dimension internationale, que les employeurs exigent une maîtrise professionnelle de l’anglais.

3/ Arriver en terrain conquis

« Le Canada ne nous attend pas, rappelle Franck Point, président de l’antenne Vancouver de l’UFE (Union des français de l’étranger) et créateur des boulangeries Faubourg. Je me souviens par exemple avoir été sollicité par des jeunes qui sortaient d’école de commerce et qui me disaient : ‘Je voudrais faire du consulting en Colombie-Britannique.’ Mais ils ne connaissaient pas les réseaux et n’avaient aucune crédibilité sur le marché ! Il faut d’abord faire ses preuves – et ce n’est pas parce qu’on est Français que les portes s’ouvrent. »

Outre-Atlantique, les plus prestigieux diplômes hexagonaux n’évoquent pas grand-chose et, à votre arrivée, vous serez peut-être amené à occuper un poste d’un niveau inférieur à celui que vous aviez en France. Voire de prendre un petit job. « Le Canadien aime bien travailler avec quelqu’un qui a une première expérience canadienne, confirme Marilène Garceau. Donc, n’attendez pas le boulot parfait et lancez-vous, cela montrera votre implication. »

Attention aussi à la question des professions réglementées : dans certains secteurs (éducation, comptabilité, santé, ingénierie, etc.), vous devrez sans doute vous soumettre à différentes procédures, variables en fonction des provinces, avant de pouvoir exercer votre métier.

Si vous ne trouvez pas de poste qui vous convient, pensez au bénévolat, qui est très valorisé au Canada. Cela vous permettra de nouer des liens et de vous créer un premier cercle relationnel, d’autant que le réseautage est incontournable outre-Atlantique.

4/ Minimiser le choc culturel

Ne vous fiez pas au (faux) sentiment de proximité que nous Français, nous aurions naturellement avec nos cousins canadiens – surtout au Québec, où notre langue en commun amplifie la méprise. Outre-Atlantique, les codes sociaux ne sont pas du tout les mêmes que dans l’Hexagone. La société canadienne est ainsi, avant tout, celle du non-conflit. « Pour l’éviter, le Canadien ne va pas forcément exprimer son opinion, indique Franck Point. Pour la petite histoire, je discutais un jour avec mon fils dans un de mes magasins, en français. Le lendemain matin, les employés sont venus me voir, inquiets que nous nous soyons disputés, alors qu’il s’agissait d’un échange de points de vue ! Pour eux, le ton de la voix et le langage du corps indiquaient une altercation. » « Le Français est dans la confrontation, aussi bien avec ses amis – on se chamaille gentiment autour d’un café – qu’au travail, renchérit Cécile Lazartigues-Chartier. Mais au Québec, si vous dites en réunion ‘je ne suis pas d’accord, ce n’est pas une bonne idée’, vous êtes très mal vu. »

Dans le milieu professionnel, la bienveillance est privilégiée et la critique, taboue. « Lors de votre réunion annuelle avec votre chef québécois, son discours va se diviser en trois parties – c’est l’approche sandwich, poursuit la consultante. Il va commencer par souligner tout ce qui va bien. Puis, il va indiquer rapidement ce qui ne va pas et, enfin, conclure avec le positif. Le Français va se dire : ‘Il y a un petit truc qui ne va pas mais ce n’est pas grave.’ Alors que le Québécois attend que vous creusiez la partie négative. »

Les relations interpersonnelles peuvent également s’avérer déstabilisantes pour les Français. Si la réputation d’ouverture d’esprit et de sociabilité des Canadiens n’est pas usurpée, créer un lien amical durable n’est pas si simple. « Les gens ont une bulle, et on ne pénètre pas facilement dans leur intimité », décrit Franck Point. Au Québec, le tutoiement généralisé peut aussi prêter à confusion. « Il ne faudrait pas en déduire forcément une proximité relationnelle, prévient Cécile Lazartigues-Chartier. On peut tutoyer et être très loin de l’autre… »

5/ Comparer en permanence France et Canada

Vous avez choisi d’immigrer pour prendre un nouveau départ. Alors ne gâchez pas tout en fronçant le nez face aux changements ! « Quand j’entends des Français dire : ‘Dans mon ancienne boîte en France, c’était pas comme ça’, je dis stop !, s’exclame Cécile Lazartigues-Chartier. Il faut sortir du jugement et accepter les choses telles qu’elles sont. » « Comparer tout le temps, c’est très mauvais pour sa propre intégration et celle de ses enfants, qui vont avoir tendance à faire pareil, ajoute Marilène Garceau. Mieux vaut profiter de l’étonnement des nouvelles expériences et de cette curiosité pour essayer de comprendre pourquoi nous sommes différents. »


Les conseils de Louise Van Winkle, responsable de la promotion francophone au service immigration de l’Ambassade du Canada en France

Louise Van Winkle CATY_PARIS-2022

« Certes, les démarches d’immigration peuvent être assez complexes, mais ne les laissez pas prendre le dessus sur votre projet. Il est important de se poser les bonnes questions : pourquoi est-ce que je veux aller au Canada, qu’aimerais-je y faire, où ai-je envie de m’installer, comment m’informer… Chaque province et territoire dispose d’un site qui décrit ses conditions d’immigration mais aussi les opportunités d’emploi, la densité de population, le mode de vie, etc. Listez ce qui est essentiel pour vous – les critères ne sont pas les mêmes si on part seul ou avec trois enfants – et étudiez les destinations en fonction. Prenez le temps de trouver votre point de chute idéal (il serait dommage de vous limiter aux seuls endroits dont vous avez entendu parler).

Même si vous choisissez une province plutôt anglophone et que vous avez un bon niveau en anglais, rapprochez-vous des communautés francophones, car elles peuvent être un atout dans votre insertion économique. N’hésitez pas aussi à faire appel aux nombreux services d’aide à l’établissement offerts par le gouvernement. »


Les conseils de Paul Trottier, conseiller en recrutement international à la Délégation générale du Québec à Paris

Paul Trottier PRESSE

« Rappelons d’abord que l’immigration au Québec est une compétence partagée entre les deux paliers de gouvernement, provincial et fédéral : le Québec est responsable de la sélection des immigrants et le Canada de leur admission.

Pour trouver un emploi au Québec depuis l’étranger, le plus efficace est de s’inscrire à une mission de recrutement comme les Journées Québec car les entreprises qui y participent sont plus familières des démarches d’immigration. Grâce à cette première expérience professionnelle, vous pourrez ensuite envisager une installation permanente au Québec.

Pour vous démarquer lors d’un entretien d’embauche avec un employeur québécois, ne cherchez pas à l’impressionner avec vos diplômes. Les recruteurs s’intéressent surtout à ce que vous pouvez apporter à l’entreprise : ils vont analyser votre savoir-faire, votre savoir-être et enfin votre formation.

Même si Montréal reste une porte d’entrée naturelle pour de nombreux Français, je conseillerais aussi d’avoir la curiosité d’aller voir ce que les autres régions du Québec ont à offrir en matière d’emplois et de qualité de vie – car vous pourriez être surpris ! Enfin, ne faites pas l’erreur de considérer le Québec comme un territoire français en Amérique. »


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D’Est en Ouest – Vivre au Canada pourquoi pas vous ? Le Figaro



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