Culture

Quand Boris Johnson dénonçait le «pillage» du Parthénon par les Anglais


Le premier ministre britannique Boris Johnson a plusieurs fois exprimé ses réticences à l’idée de restituer à la Grèce les marbres du Parthénon conservés au British Museum. AFP / JOHN SIBLEY / LEON NEAL

Le premier ministre, opposé aujourd’hui à une restitution à la Grèce des chefs-d’œuvre exposés au British Museum, militait, plus jeune, pour leur retour «immédiat» à Athènes.

Le stratège anglais de Downing Street cachait, en son temps, une graine plus philhellène. Le premier ministre britannique Boris Johnson n’a jamais fait mystère, ces dernières années, de sa répugnance à l’idée de restituer à la Grèce les marbres du Parthénon exposés au British Museum. Une position déjà soutenue sous son mandat de maire de Londres, entre 2008 et 2016. L’homme politique soutenait, pourtant, l’exact contraire dans sa prime jeunesse, a révélé la presse grecque en exhumant d’anciens textes concernant les trésors rapportés à Londres par Lord Elgin, au début du XIXe siècle.

«Il n’y a absolument aucune raison pour que les marbres Elgin, qui sont les trésors les plus importants et les plus beaux que nous ait laissés le monde antique, ne soient pas immédiatement rendus par le British Museum à leur lieu d’origine : Athènes», écrivait Boris Johnson en 1986, dans l’une des deux lettres conservées dans une bibliothèque de l’université d’Oxford et retrouvées par le correspondant londonien du quotidien grec Ta Nea. Le jeune homme y mentionne aussi la politique «sophiste, intransigeante» et «insupportable aux personnes cultivées» pratiquée par le gouvernement britannique de Margaret Thatcher au sujet de ces marbres et reliefs sculptés datés du milieu du Ve siècle av. J.-C. et attribués à Phidias.

Âgé de 21 ans, à l’époque de ses études au sein de la prestigieuse université, le futur premier ministre avait pris la plume en mars et avril pour adresser son plus fervent soutien à Melina Mercouri, actrice puis ministre grecque de la Culture qui a ardemment œuvré pour la restitution des marbres du Parthénon. Pour l’occasion, l’Oxford Union, l’association étudiante de l’université dont Boris Johnson était à l’époque le président, avait organisé un débat au sujet de la restitution, assorti du vote d’une résolution en faveur du retour des marbres. Des membres de l’ambassade grecque avaient été conviés en marge de l’événement. Une photographie d’époque témoigne également de la rencontre entre le jeune Boris Johnson et Melina Mercouri.

«Des années plus tard, lorsqu’il était maire de Londres, je l’ai rencontré dans son bureau en compagnie de l’ambassadeur Konstantinos Bikas. Je lui ai rappelé le débat de 1986 et lui ai donné une photo encadrée de lui aux côtés de Mercouri. Il a souri et a changé de sujet», a témoigné pour Ta Nea l’ancienne conseillère culturelle de l’ambassade grecque à Londres, Victoria Solomonidis.

En décembre, Ta Nea avait déjà révélé l’existence d’un petit article publié en avril 1986 dans le journal de l’Oxford Union, dans lequel Boris Johnson appelait également au retour des marbres. L’étudiant y dénonçait aussi le «pillage en règle» du Parthénon par Lord Elgin, qui avait su profiter de l’état «de quasi-anarchie» qui régnait alors dans cette partie de l’Empire ottoman.

Acquisition légale contre pillage en règle

Trente-cinq ans plus tard, la position du jeune homme devenu premier ministre du Royaume-Uni a évolué. «Les marbres ont été légalement acquis par Lord Elgin selon les lois appropriées de l’époque», a affirmé Boris Johnson en mars 2021, en reprenant mot pour mot les arguments traditionnellement mis en avant par le British Museum et le gouvernement britannique, autrefois malmenés.

La dernière campagne menée depuis l’automne par les autorités grecques pour demander le retour des marbres du Parthénon conservés au British Museum progresse à pas de fourmis depuis plusieurs mois. Menées sous l’égide de l’Unesco, les discussions entre le Royaume-Uni et la Grèce ont peiné à démarrer dans de bonnes conditions, les autorités britanniques renvoyant plusieurs fois la balle entre le gouvernement et la direction du musée. À la mi-juin, cependant, le British Museum a entrouvert la possibilité d’un accord de partage des marbres avec le musée de l’Acropole, à Athènes.

En Grèce, le gouvernement de Kyriakos Mitsotakis a fait de la restitution des marbres du Parthénon une des priorités de son ministère de la Culture. «Il ne pourrait y avoir de meilleur moment que maintenant pour réunir la partie manquante des sculptures du Parthénon dans leur lieu de naissance, en Grèce», a plaidé le premier ministre grec le 12 novembre à l’Unesco, dans un contexte où les restitutions internationales se font plus nombreuses. Au Royaume-Uni, l’opinion publique penche désormais aussi en faveur du retour des marbres, un dossier soutenu par l’acteur américain George Clooney. Selon un sondage réalisé en novembre 2021, 59% des Britanniques estiment que les marbres Elgin «appartiennent à la Grèce» .



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