Culture

Un siècle plus tard, une rare toile de jeunesse d’Egon Schiele redécouverte à Vienne


Afin de financer la restauration et l’acquisition du tableau Leopold Czihaczek au piano retrouvé chez des particuliers, le Leopold Museum de Vienne va mettre aux enchères certaines de ses œuvres en format NFT.

Disparue depuis 1930. À cheval entre l’expressionnisme et l’Art Nouveau, une toile d’Egon Schiele (1890-1918), artiste autrichien connu pour avoir fait de la nudité corporelle son courant d’expression artistique, vient d’être retrouvée chez des particuliers à Vienne. Elle s’illustre de par son originalité puisqu’elle a été peinte à ses débuts alors qu’il n’avait que 16 ans, âge auquel il est devenu le protégé de Gustav Klimt. Intitulée Leopold Czihaczek au piano, cette œuvre, peu connue du grand public et des experts, figure désormais entre les murs du Leopold Museum de Vienne, qui compte la restaurer pour l’exposer un temps. Parmi les peintures, aquarelles et gravures de l’artiste que le musée possède, certaines seront dupliquées sous format NFT afin de récolter de l’argent dans le but d’acquérir définitivement la toile.

«Le tableau de Schiele que l’on croyait perdu a en fait été conservé en bon état dans une collection privée», a annoncé dans un communiqué le directeur du musée, Hans-Peter Wipplinger. «Les propriétaires de l’œuvre ont accepté de mettre le tableau à la disposition du Musée Léopold en tant que prêt permanent», a-t-il expliqué, ce qui viendra enrichir la plus grande collection au monde des œuvres d’Egon Schiele, qui compte 42 peintures et 184 aquarelles. «Suite au nettoyage et à la restauration du tableau, nous souhaitons le rendre accessible au public dans le cadre de notre présentation permanente sur la ville de Vienne au XXe siècle», a-t-il conclu à propos de l’huile sur toile, qui s’inscrit parmi les 300 peintures et 3000 œuvres sur papier réalisées par le peintre avant sa mort, à seulement 28 ans, de la grippe espagnole.

Leopold Czihaczek, oncle et tuteur d’Egon Schiele

Cette toile de jeunesse représente Leopold Czihaczek, devenu son oncle et tuteur légal depuis le décès prématuré de ses parents, jouant du piano dans son appartement situé dans le quartier de Leopoldstadt à Vienne. Le tableau marque les prémices d’une série de peintures représentant son oncle, marié à l’une des sœurs de son père, toutes réalisées entre 1907 et 1908. C’est durant cette même année qu’Egon Schiele fait appel à Gustav Klimt, qui encadre alors, à cette époque, de jeunes artistes en devenir. Le maître du courant Art Nouveau l’a pris sous son aile en lui arrangeant des modèles et en le présentant à de grands mécènes. Ainsi, au début de son œuvre, alors même qu’il était encore mineur, de fortes ressemblances avec les peintures de Klimt sont observées.

«En termes de style, le pinceau de l’artiste révèle des tendances impressionnistes et montre la palette feutrée caractéristique de ses premières œuvres», explique dans un communiqué Verena Gamper, la directrice du Centre de recherche du Musée Léopold de Vienne. «En termes de composition, Schiele a proposé une différenciation des sections, tantôt éclairées ou ombragées, ce qui lui a permis de négocier le format horizontal exceptionnellement grand malgré la perspective choisie», a-t-elle poursuivi avant de décrire un effet d’immersion totale dans la musique, grâce à «la vue rapprochée du pianiste, l’encadrement de la tête montrée de profil, les vitres lumineuses et la focalisation qui en résulte sur les feuilles de musique». Un effet transmis par l’artiste en floutant les mains de son oncle, «comme si elles étaient détachées du reste du corps».

Une toile recherchée depuis cent ans

La toile Leopold Czihaczek au piano était seulement connue de quelques études préalables et d’un premier dessin préliminaire retrouvé, qui à son dos indique «Schiele 17.IV.07». Plus tard, une carte postale en noir et blanc, datée de 1930, montre une pièce dans laquelle le tableau est accroché au mur. Il est arrivé au musée avec ce même cadre de civière d’origine, au sein duquel la peinture est accrochée avec de vieux clous. Elle aurait été envoyée à la femme de Leopold Czihaczek par un des amis du couple appelé Gustav Huber. Et ce dernier, d’après le communiqué de l’institution, aurait possédé le tableau jusqu’à sa mort en 1945, au moment où la ville a été sujette à de nombreux bombardements pour reposer ensuite chez un particulier. Une discrétion étonnante, tant les œuvres d’Egon Schiele sont recherchées et vendues à des prix considérables, à l’image du Portrait d’Adele Bloch Bauer parti à 140 millions de dollars en 2006.

La dernière trace du tableau remonte à 1930, où il figure, accroché au mur, sur cette carte postale en noir et blanc de Gustav Huber envoyée à Marie Czihaczek. Musée Leopold, Vienne

Mise sous NFT pour restauration et acquisition

Après la redécouverte de la toile, l’institution a décidé d’en créer un NFT (jeton non fongible). Celui-ci sera partie intégrante de la collection «Timeless Reflections. La collection originale NFT d’Egon Schiele», composée de 23 autres œuvres qui seront mises aux enchères du 16 au 26 mai. Les toiles et dessins sont répartis selon leur «rareté» et seront vendus en conséquence, pour des sommes comprises entre 500 et 100.000 euros. Parmi ceux-ci, le célèbre Autoportrait à la lanterne chinoise de l’artiste autrichien peint en 1912 ainsi que la toile Mère morte datée de 1910. Certaines sont déjà proposées à la vente depuis le 2 mai, comme le tableau Nu féminin aux bras levés de 1910 et l’Autoportrait nu, accroupi réalisé par l’artiste en 1916.

En accord avec la famille, cette mise sous format NFT permettra de restaurer la toile grâce aux fonds récoltés et de l’exposer ensuite dans la collection des œuvres de Schiele au Léopold Museum de Vienne. L’institution autrichienne a par ailleurs annoncé que l’argent récolté lui permettra éventuellement de racheter la toile Leopold Czihaczek au piano, pour l’incorporer définitivement à sa collection des œuvres d’Egon Schiele. Ces toiles seront parallèlement présentées au public lors d’une exposition numérique au White Space Chelsea pendant la Frieze New York, du 18 au 22 mai.



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