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on vous explique pourquoi l’hypothèse d’une adhésion de la Finlande à l’Otan est vécue comme un affront par la Russie



C’est une volte-face. Inquiète pour sa sécurité depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la Finlande a fait savoir, vendredi 15 avril, par la voix de sa ministre des Affaires européennes, Tytti Tuppurainen, qu’il était « très probable » que son pays dépose une candidature pour intégrer l’Otan prochainement. 

Deux jours plus tôt, lors d’un déplacement chez son voisin suédois, qui réfléchit également à une adhésion future, la cheffe du gouvernement finlandais, Sanna Marin, avait déclaré que la décision d’une candidature serait prise « d’ici quelques semaines », après un débat organisé au Parlement. 

Un affront diplomatique et militaire pour la Russie, qui a toujours refusé de voir l’alliance militaire des pays de l’Atlantique Nord à ses portes pour s’affirmer face à l’omniprésence occidentale dans la région. Plusieurs membres du gouvernement russe ont déjà prévenu qu’une adhésion de ces deux pays neutres à l’Otan aurait « des conséquences militaires et nucléaires ».

Pour la Finlande, qui compte une frontière de 1 300 kilomètres avec la Russie, rejoindre les 30 membres de l’Alliance menée par les Etats-Unis apporterait une dissuasion « considérablement plus grande » contre une attaque de son voisin, indique le « livre blanc » dévoilé il y a quelques jours (lien en anglais) sur ce sujet spécifique.

Si ce rapport commandé en urgence par le gouvernement finlandais après l’attaque russe de l’Ukraine n’implique pas pour le moment de décision pour ou contre l’adhésion, pour le ministre des Affaires étrangères, Pekka Haavisto, la guerre en Ukraine impose d’ouvrir ce débat sur l’Otan.

« La Russie est prête à prendre plus de risques qu’avant, comme l’a montré cette attaque contre l’Ukraine. Ensuite, elle s’est montrée capable de concentrer plus de 100 000 hommes contre un pays », assure le ministre finlandais à l’AFP. Ce dernier veut aussi anticiper les éventuels risques futurs qu’encourt son pays face à la Russie, notamment « face aux armes nucléaires tactiques et chimiques ». 

« Les Finlandais semblent avoir pris leur décision et il y a déjà une énorme majorité en faveur d’une adhésion à l’Otan », assurait en début de semaine la ministre des Affaires européennes, Tytti Tuppurainen. Le soutien à l’adhésion, qui stagnait autour de 20% à 25% depuis des décennies, a subitement triplé, passant de 70% à 80%, selon les derniers sondages réalisés dans le pays. La Première ministre finlandaise, Sanna Marin, pourrait donc annoncer la décision de son pays de rejoindre l’Otan sans même passer par un référendum préalable.

Du côté du Parlement finlandais, une nette majorité politique se dessine également. Parmi les députés ayant déjà fait connaître leur position, une centaine sur 200 sont en faveur d’une adhésion et seulement 12 sont contre, selon les pointages de plusieurs médias locaux. 

La Finlande a aussi multiplié les consultations ces dernières semaines avec la quasi-totalité des membres de l’Otan. Comme la Suède, le pays a obtenu des assurances claires du secrétaire général de l’Organisation, Jens Stoltenberg, et le soutien de plusieurs pays comme les Etats-Unis, l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni.

Ces annonces en provenance du voisin finlandais ont fait bondir le Kremlin. La Russie considère en effet l’Alliance comme une menace existentielle pour sa sécurité nationale. Elle a notamment justifié son offensive en Ukraine par sa volonté de contrer les ambitions atlantistes de Kiev et le soutien politique et militaire occidental à l’Ukraine.

Moscou a donc pris l’habitude de menacer régulièrement la Finlande et la Suède en cas d’adhésion à l’Otan. Mais, jeudi 14 avril, les mises en garde sont montées d’un cran. En cas de ralliement, « les frontières de l’Alliance avec la Russie feraient plus que doubler. Et ces frontières, il faudra les défendre », a relevé l’actuel numéro deux du Conseil de sécurité de Russie, Dmitri Medvedev, dans un message sur Telegram. 

« Une personne saine d’esprit (…) ne peut souhaiter une hausse des tensions à sa frontière et avoir à côté de sa maison des (missiles) Iskander, hypersoniques, et des navires avec des armes nucléaires. »

Dmitri Medvedev, numéro 2 du Conseil de sécurité de Russie

sur Telegram

« Dans ce cas, il ne pourra être question d’une [mer] Baltique non nucléaire », a-t-il ajouté. Il a également évoqué des déploiements d’infanterie et de systèmes anti-aériens dans le nord-ouest de la Russie et des forces navales dans le golfe de Finlande.

Ces pays « doivent comprendre les conséquences d’une telle mesure pour nos relations bilatérales et pour l’architecture sécuritaire européenne dans son ensemble« , a de son côté déclaré la porte-parole du ministère des Affaires étrangères russe, Maria Zakharova.

« Etre membre de l’Otan ne peut renforcer leur sécurité nationale. De facto, la Finlande et la Suède seront la première ligne de l’Otan. »

Maria Zakharova, porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères

dans un communiqué

En cas d’entrée de la Finlande dans l’Otan, les Etats-Unis et leurs alliés occidentaux auraient donc la possibilité de se positionner militairement à la frontière russe. « Pour un grand stratège comme Poutine, c’est tout de même l’un des plus grands échecs qui soit. Si on ajoute à cela l’unité occidentale que l’invasion [de l’Ukraine] suscite, le renforcement de l’Otan ou encore la réponse de l’Union européenne en tant qu’entité, c’est presque une carte Bingo de tout ce que la Russie ne voulait pas », estime Charly Salonius-Pasternak, chercheur à l’Institut finlandais des affaires internationales, dans Libération (article réservé aux abonnés).

La Finlande redoute désormais des représailles de Moscou, en particulier pendant la période de transition qui précédera son éventuelle entrée dans l’Otan. Helsinki pense qu’il faudra quatre à douze mois pour boucler le processus d’adhésion après un accord et une ratification unanime de l’Otan. La Finlande serait alors le 31e Etat à rejoindre l’Alliance atlantique, qui inclut déjà la Pologne, l’Estonie, la Lituanie et la Lettonie, frontalières de la Russie.





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